Wisdom for Wellness

Alternative Approaches to Healing and Transition with Elder Deb

June 24, 2021 Sarah & Sam Season 1 Episode 6
Wisdom for Wellness
Alternative Approaches to Healing and Transition with Elder Deb
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This month Sam and Sarah discuss how Westernized Mental Health approaches don’t work for everyone. Elder Deb Eisan joins us this month to share her experiences of healing, transition and alternative approaches to supporting your Mental Health. Think: approaches other than talk therapy. Elder Deb generously shared teachings from her Indigenous culture with us and practical examples of how we can implement them in our lives.

Indian Residential School Crisis Line:
1-866-925-4419

Kids Help Phone: 
You can connect with an Indigenous volunteer crisis responder, when available by following these instructions below:
Youth: TEXT
FIRST NATIONS, INUIT or METIS to 686868
Adults: TEXT FIRST NATIONS, INUIT or METIS to 741741 

What is an Elder? https://www.thecanadianencyclopedia.ca/en/article/indigenous-elders-in-canada 

Medicine Wheel: http://anishinaabemodaa.com/lessons?lesson_id=51 

Reconnecting with your culture in Kingston: 

Kingston Indigenous Language Nest's Cultural Teaching's Series

Ollin: https://ollin.ca/ 

ONWA: https://www.onwa.ca/ 

Metis Nation of Ontario’s Kingston Branch: https://www.crnckingston.ca/metis-nation-of-ontario 

KCHC: https://www.facebook.com/Indigenous-Health-Program-NACHCKCHC-168958083250051/ 

Mi’kmaw Native Friendship Centre: http://mymnfc.com/

LET US KNOW WHAT YOU THINK OF THIS MONTH’S EPISODE BY FILLING OUT THE SURVEY HERE:

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This podcast is brought to you by the Kingston Military Family Resource Centre’s Mental Health and Wellness Team. To follow along on the podcast journey, follow KingstonMFRC on Facebook. More information about the podcast can be found on kmfrc.com/wellness. 

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Épisode 6 : Aînée Deb

Sam :

La Sagesse pour le bien-être englobe tout ce qui concerne la santé mentale et le bien-être. Je suis travailleur social certifié et coordinateur du programme pour les familles de vétérans.

 

Sarah :

Et je suis Sarah, travailleuse sociale certifiée, et je conseille les membres des familles des militaires. Joignez-vous à nous, alors que nous avons d’importantes conversations avec des partenaires communautaires, afin d’aider nos familles de militaires à acquérir des capacités d’adaptation et de susciter des discussions sur la façon de mieux prendre soin de nous-mêmes et des autres.

 

Sam :

La Sagesse pour le bien-être vous fournira des références utiles, des techniques et de nouvelles perspectives pour que vous puissiez continuer à améliorer votre santé mentale et votre bien-être.

 

Sarah :

Ce balado vous est présenté par l’équipe de santé mentale et de bien-être du Centre de ressources pour les familles militaires de Kingston.

 

Sarah : 

Bonjour à tous! Avant de commencer l’épisode d’aujourd’hui, Sam et moi aimerions prendre un moment pour discuter de quelque chose dont nous aurions dû parler au début de la diffusion de notre balado en janvier, soit rendre hommage à la terre d’où nous vous présentons ce balado. Sam et moi vivons et travaillons à Kingston, et ce balado est enregistré dans la région de Kingston.

 

Nous avons travaillé avec Grand-mère Kathy Brant, une Mohawk de la Confédération des Six Nations Haudenosaunee. Grand-mère Kathy a eu la gentillesse de nous fournir un hommage à la terre que nous utiliserons à l’avenir pour notre balado et notre centre. Nous sommes reconnaissantes à Grand-mère Kathy pour cette offrande. Nous l’inclurons dans tous nos épisodes à l’avenir. Grand-mère Kathy nous a offert cet hommage à la terre, des mots à utiliser dans l’esprit du rassemblement. 

 

Nous voulons rendre hommage aux premiers gardiens de ces terres qui leur ont été confiées depuis des temps immémoriaux, les Algonquins anichinabés et la Confédération des Six Nations Haudenosaunee, qui comprend nos voisins les Mohawks et de nombreux autres membres des Premières Nations qui ont traversé ces terres pour se nourrir, commercer et survivre. Cet hommage nous amène à reconnaître leur histoire plus longue et antérieure à l’établissement des colonies européennes. Il permet également de reconnaître l’importance de ce territoire pour les peuples autochtones qui y ont vécu et qui continuent d’y vivre. Un peuple dont les pratiques et les croyances étaient liées à la terre et qui continue aujourd’hui à se développer en relation avec le territoire et ses autres habitants.

 

Sam : 

Les communautés autochtones de Kingston continuent de refléter les racines algonquines anichinabées et haudenosaunee de la région, mais il y a également une importante communauté de Métis, de Cris, d’Inuits et une nouvelle communauté d’autres Premières Nations provenant de nombreuses nations de l’île de la Tortue, y compris du Mexique et de l’Amérique centrale, qui sont présentes ici aujourd’hui. C’est avec une profonde humilité que nous reconnaissons et offrons notre gratitude pour leurs contributions à cette communauté, en ayant du respect pour tous, alors que nous partageons maintenant l’espace et marchons côte à côte vers l’avenir. 

 

Nous sommes très reconnaissantes d’avoir eu l’occasion de parler avec l’aînée Deb et de diffuser sa voix en juin, mois de l’histoire des autochtones. Nous avons fait l’enregistrement avec l’Aînée Deb en mars dans l’espoir de partager oralement des traditions et des histoires, ainsi que des approches alternatives à la guérison et aux transitions. 

 

Sarah :

Nous tenons à souligner le chagrin et la perte considérables causés par la découverte de 215 enfants autochtones enterrés au pensionnat autochtone de Kamloops. Cette découverte nous a poussés à réfléchir aux vies perdues, aux enfants qui n’ont pas encore été retrouvés, à leurs familles et à toutes les personnes touchées par le système des pensionnats, y compris les survivants. 

 

Sam :

Sarah et moi, les Services de bien-être et moral des Forces canadiennes et le Centre de ressources pour les familles militaires de Kingston reconnaissons l’histoire, les cultures, la contribution et la résilience des peuples et des communautés autochtones, et nous sommes solidaires avec eux. En produisant cet enregistrement, Sarah et moi avons beaucoup appris de l’Aînée Deb et de Grand-mère Kathy sur la transmission orale de leurs récits et enseignements. Le concept d’humilité ressort pour moi, tel qu’il a été partagé par Grand-mère Kathy et l’Aînée Deb dans leurs messages portant sur le cheminement les uns à côté des autres. Je sais, Sarah, qu’il y a un élément que l’Aîné Deb a partagé et qui t’a aussi marqué.  

 

Sarah : 

Oui, sans trop s’avancer sur le contenu de l’épisode, l’Aînée Deb définit la réconciliaction et l’importance de s’allier avec les communautés autochtones au pays et de les défendre, alors que nous avançons ensemble. Cela se reflète également dans l’hommage à la terre de Grand-mère Kathy lorsqu’elle parle de partager l’espace et de marcher côte à côte vers l’avenir. 

 

Nous voulons mettre en évidence ces thèmes communs pour attirer l’attention de nos auditeurs pendant la conversation. L’Aînée Deb nous dit qu’il y a une raison pour laquelle nous avons deux oreilles et une bouche, et nous explique ce que cela signifie pour elle. J’espère que nos auditeurs apprécieront la discussion et trouveront de la profondeur à la fois dans l’hommage à la terre de Grand-mère Kathy et dans les paroles de l’Aînée Deb. 

 

Sam : 

Les conversations que nous avons eues ici nous ont invitées à réfléchir, à apprendre et à grandir. Nous espérons que cela nous aidera à être des alliés solides et à participer activement au processus continu de réconciliaction. Nous invitons nos auditeurs et auditrices à faire de même. Dans notre description, nous avons indiqué quelques ressources, dont le numéro de la ligne Criss des pensionnats autochtones, soit le 1-866-925-4419. Les jeunes et les adultes disposent d’une ligne service « Jeunesse, J’écoute ». Les jeunes peuvent envoyer un texto au numéro 686868 pour joindre les Inuits ou les Métis des Premières Nations, et les adultes peuvent composer le 741741. 

 

Sarah :

Nous avons l’honneur de vous présenter cet épisode avec l’Aînée Deb. 

 

Sam :

Bonjour à tous! Nous sommes de retour avec notre sixième balado de Sagesse pour le bien-être. Aujourd’hui, nous avons la chance de pouvoir parler avec l’Aînée Deb, qui est une Ojibwée Anichinabée Quay de la Première nation de Batchewana, et Premier maître de deuxième classe à la retraite des Forces armées canadiennes. Les aînés sont des personnes respectées qui jouent un rôle important dans les communautés autochtones. Ce sont des gardiens du savoir qui entretiennent un lien vivant avec le passé. Ils peuvent servir d’enseignants, de guérisseurs, de conseillers et de consultants. Les aînés sont reconnus et choisis dans leur communauté pour la sagesse, l’harmonie et l’équilibre de leurs actions et de leurs enseignements. 

 

Au cours de sa carrière militaire canadienne de 36 ans, l’Aînée Deb a effectué de nombreux tours de service, y compris la fermeture de la base des Nations Unies au Rwanda. Elle a été affectée sur le NCSM Iroquois où elle a passé sept mois à naviguer dans la mer d’Arabie, en appui à la guerre contre le terrorisme. L’Aînée Deb a reçu la médaille du jubilé de diamant de la Reine pour son travail de défense et de sensibilisation à la culture des peuples autochtones servant dans les forces armées canadiennes. Elle a récemment été nommée capitaine de vaisseau honoraire du Commandement des forces maritimes et est affiliée au NCSM Margaret Brooke. L’Aînée Deb est membre du comité consultatif de Caring Compassion auprès du ministre des Anciens Combattants. Elle est également un membre très actif de sa communauté à Halifax. Elle est membre de l’Indigenous Council of Elders des universités Dalhousie et Saint Mary’s, présidente du groupe de travail sur la diversité de la police de Halifax, et fait office d’aînée et de dispensatrice de connaissances auprès du service d’incendie de Halifax. 

 

Nous sommes très reconnaissantes à l’Aînée Deb d’avoir pris le temps, malgré son emploi du temps chargé, de discuter avec nous des approches alternatives de guérison et d’amélioration de la santé mentale, ainsi que des rituels personnels qui ont facilité sa transition de la vie militaire à la vie civile. Nous espérons que vous prendrez autant de plaisir à l’entendre que nous. La sagesse de l’Aînée Deb nous a clairement fait du bien! 

 

Sam : 

Bonjour, Aînée Deb! Merci beaucoup de vous joindre à nous aujourd’hui. Commençons sans plus tarder, car nous savons que vous avez beaucoup à partager avec nous. Vous avez servi dans les Forces armées pendant 36 ans. Vous étiez premier-maître de deuxième classe, et avez récemment reçu un titre honorifique. Pourriez-vous partager avec nos auditeurs et auditrices un peu de votre longue carrière militaire?

 

Aînée Deb :

Merci. Tout d’abord, merci de m’avoir invitée aujourd’hui, je suis très enthousiaste à l’idée de participer. Les balados c’est nouveau pour moi et j’aime essayer de nouvelles choses. On m’a offert le poste de capitaine de vaisseau honoraire du NCSM Margaret Brooke. C’est l’un des nouveaux navires qui arrivent dans la Marine. Le navire porte le nom d’une ancienne combattante, et je suis passionnée par la participation des femmes aux forces armées canadiennes, et plus particulièrement par les femmes autochtones. Pendant mon service, j’ai parlé à de nombreuses jeunes femmes qui hésitaient à s’engager dans l’armée parce qu’elles pensaient devoir choisir entre le service et le mariage, la famille et leur communauté. J’ai passé beaucoup de temps à informer les jeunes femmes de mon parcours professionnel, et des voyages et opportunités professionnelles qu’il m’a permis de réaliser. 

 

Je suis originaire d’une petite communauté du nord de l’Ontario appelée Première Nation Batchewana, et lorsque j’ai quitté la maison à l’âge de 17 ans, je n’avais aucune idée des expériences qui m’attendaient en tant que membre des Forces armées canadiennes. Une partie de ce que je suis aujourd’hui découle de ma carrière dans les Forces armées. Je suis enthousiaste à l’idée de voir d’autres jeunes hommes et femmes autochtones y faire carrière, même s’ils n’y consacreront pas comme moi 36 ans. Il s’agit certainement d’un choix de carrière intéressant et viable pour les jeunes, et en particulier pour les jeunes autochtones. 

 

Sam :

Vous avez mentionné que les jeunes autochtones craignaient de se déconnecter de leur communauté d’origine lorsqu’ils envisageaient de s’engager dans les forces armées, est-ce exact? 

 

Aînée Deb :

Oui, il ne s’agit pas seulement de la peur d’être déconnectés de nos communautés d’origine, mais aussi de la peur de perdre le sens de soi et l’identité en tant qu’autochtone. Il y a beaucoup de récits et d’expériences que j’aime partager, parce que notre peuple est de tradition orale. La connaissance est transmise par le biais des récits et du souvenir de choses qui se sont produites. Il y a du bon et du mauvais dans tout ce que nous faisons dans la vie. Ce qui compte, c’est la façon dont on envisage les nécessités de la vie.

 

Un aîné micmac, ici en Nouvelle-Écosse, parle d’un enseignement appelé Two Eyed Seeing, qui consiste à regarder à travers deux lentilles différentes. L’une de ces lentilles est celle de nos racines autochtones, qu’elle soit anichinabée, innue, crie ou autres. Il s’agit de notre voie traditionnelle qui suit les enseignements et les voies de nos grands-mères, aînées et tantes. L’autre lentille est la voie colonialiste, et ce chemin sur lequel nous sommes. L’approche « Two Eyed Seeing » nous enseigne qu’en tant qu’autochtone, nous pouvons regarder la voie colonialiste et en tirer ce dont nous avons besoin pour survivre et suivre une bonne voie. Dans la voie traditionnelle, nous conservons nos traditions, nous ne les perdons pas. En tant qu’Anichinabée Quay au sein de l’armée, j’ai pu suivre ces voies non pas seule, mais avec le soutien de mes aînés, l’aide de mentors et du peuple traditionnel anichinabé. 

 

J’ai eu aussi de nombreux mentors dans la voie colonialiste et ma carrière dans la marine. L’un de mes plus grands soutiens, mon roc, est mon mari depuis 45 ans. On s’est rencontrés durant les deux semaines d’entraînement de base. Je dis aux gens que le mariage n’est pas toujours égal, une personne donne plus, mais ce n’est pas la même personne qui donne plus à chaque fois. C’est donnant-donnant et ce n’est pas toujours un chemin facile, cela demande du travail. Le fait d’avoir des mentors des deux côtés de notre chemin nous aide à faire la meilleure transition possible tout au long de notre vie et de notre carrière dans les Forces armées canadiennes. Les mentors sont si importants pour nous guider et soutenir notre réussite dans tout ce que nous choisissons pour nous-mêmes. 

 

Sarah : 

Merci beaucoup d’avoir partagé votre expérience et votre point de vue. Je pense qu’il sera utile pour nos auditeurs de l’entendre. Je sais que vous avez également des connaissances importantes à partager sur la façon de passer de la vie militaire à la vie civile. Pouvez-vous nous parler de votre vécu durant cette transition, de ce qui vous a été utile dans ce processus et de ce que vous en avez appris? 



 

Aînée Deb : 

Ma transition de la vie militaire à la vie civile à Halifax s’est faite relativement sans heurts parce que j’ai pu entrer en contact avec le Centre d’amitié autochtone micmac. Je suis en territoire micmac ici, et même si mes origines sont Ojibwées — je suis Anichinabée — le lien avec la culture autochtone est très important pour moi. Le Centre d’amitié autochtone micmac m’a offert cette connexion à bras ouverts. Il n’est pas seulement destiné aux Micmacs, mais à tous ceux qui viennent sur le territoire. Cela a été pour moi une sorte de grâce salvatrice. Lorsque j’ai pris ma retraite, je savais que je voulais rendre la pareille. Souvent, lorsqu’un autochtone a une profession, il l’utilise pour rendre service à sa communauté. Je savais que je resterais à Halifax après ma retraite parce que mon mari est d’ici et que mes cinq petits-enfants sont ici. Donc, pour redonner à ma communauté, le Centre d’amitié était le choix évident. 

 

J’ai pris ma retraite un vendredi en décembre 2011. J’ai enlevé mes bottes de mer, et le lundi matin, j’ai mis des mocassins et j’ai commencé à travailler au Centre d’amitié. J’y suis toujours. C’est ma maison loin de la maison et l’une de mes trois familles. J’ai ma famille immédiate ici, ma famille en Ontario et ma famille au Centre d’amitié. Le Centre m’offre un lien avec la communauté, la culture et les gens, ce qui m’aide à me sentir enracinée, et j’y apporte mon aide. 

 

Ma transition a été facile, mais certaines choses me manquent. Mon métier était technicienne en approvisionnement. Même si j’ai été conseillère pendant les 10 à 12 dernières années de ma carrière, lorsque je vois les navires prendre la mer depuis le port d’Halifax, je ressens le désir d’être à bord. Il y a des marins autochtones sur le chantier naval, des aviateurs et aviatrices autochtones, et je voulais encore pouvoir partager la culture et les enseignements et éduquer les gens. J’ai gardé un lien étroit avec la marine ici à Halifax, et ils sont très réceptifs et ouverts aux enseignements et à l’éducation sur différents aspects. Cela a également facilité ma transition. J’ai pu garder un pied dans les deux mondes. Même comme civile, j’ai maintenu un lien étroit avec les amiraux de l’arsenal et le commandant de la base de Stadacona. 

 

Quelques années après ma retraite, on m’a demandé de prendre le poste de capitaine de vaisseau honoraire. C’était un tel honneur d’avoir été sollicité et d’avoir l’opportunité de sensibiliser et d’éduquer davantage de gens. Je me suis sentie très privilégiée de pouvoir faire cela, de partager cette information et ma culture, parce que j’aime partager ma culture. Je ne suis ni professeure ni experte en quoi que ce soit, mais j’aime partager parce que je ne pense pas que les gens naissent racistes ou discriminatoires; c’est un processus inculqué, et je vois dans mon parcours des gens qui veulent apprendre. Si vous ouvrez suffisamment la porte pour qu’ils ne soient pas gênés de poser des questions, alors ils veulent en savoir plus et c’est positif pour moi. Dans mon parcours, j’ai rencontré très peu de personnes fermées à l’idée d’apprendre des choses différentes, de découvrir des cultures différentes. 

 

Sam :

Il s’agit d’un processus et d’un vécu tellement naturels et appropriés pour faire ce que vous aimez, et pour continuer à partager les récits et les connaissances de votre culture. Pouvoir fournir des connaissances et faire ce que l’on aime, c’est merveilleux. 

 

Aînée Deb :

La plupart des gens qui me connaissent diraient que j’aime parler, ce qui est vrai, alors autant utiliser cet amour de la parole pour partager l’amour de ma culture! J’ai une histoire que j’appelle mon histoire d’éléphant. Nous voulons claquer des doigts et faire en sorte que tous les humains ne soient plus racistes ou discriminatoires, et qu’ils comprennent pourquoi les peuples autochtones en sont là aujourd’hui, mais c’est une tâche ardue. Il y a quelques années, j’ai rencontré une femme micmaque qui m’a raconté comment on mange un éléphant. Elle m’a dit : « Imaginons que nous avons très faim, qu’il y a une énorme portion d’éléphant dans notre assiette, mais que l’on constate qu’on ne peut tout manger en un seul repas. On commence alors à manger une bouchée, un morceau de l’éléphant à la fois. Avant longtemps, l’éléphant aura disparu. 

 

C’est comme ça que je vois le processus de partage. C’est terrifiant de penser que tout le monde puisse être éduqué d’un simple claquement de doigts. Quand j’envisage un balado, un cercle de partage et une discussion à la fois, j’ai alors espoir qu’un jour le but sera atteint, mais pas de mon vivant. Je crois vraiment que nous sommes dans une bonne voie. Les Forces armées canadiennes prennent des mesures pour éduquer et comprendre la culture, et c’est pour moi un pas en avant positif. C’est pourquoi je continue. Mon éléphant est énorme, mais je le prends une bouchée à la fois. 

 

Sam :

C’est un très bon euphémisme, merci de le partager avec nous. Je pense que c’est aussi une bonne façon d’envisager la transition. Beaucoup de membres et de familles qui quittent l’armée se sentent accablés. Lorsqu’on se sent accablé, on a tendance à ralentir. C’est plus facile à aborder quand on prend les choses une par une et qu’on célèbre les progrès accomplis. 

 

Aînée Deb : 

Vous avez tout à fait raison. Les enseignements de la roue de médecine peuvent également nous aider à faire la transition. C’est important pour tout le monde, pas seulement pour les autochtones. Imaginons que la roue de médecine est une assiette qu’il faut maintenir à niveau pour que la nourriture ne glisse pas. Elle est divisée en quatre quadrants. Le chiffre quatre est très important dans notre culture. Les quatre quadrants sont l’est, le sud, le nord et l’ouest. Des enseignements différents sont liés à chaque quadrant. Au milieu, là où les quatre se rejoignent, nous dessinons un petit cercle et ce cercle représente chacun de nous. C’est la personne qui se trouve dans notre roue de médecine personnelle. Au cours de notre vie, et en particulier en tant qu’anciens combattants, on regarde l’assiette qui tourne en permanence et on se balance comme sur un ballon d’exercice. On ne sent pas bien si quelque chose est déséquilibré dans notre vie, par exemple notre santé mentale, physique ou spirituelle. Il y a quatre noyaux dans le quadrant de la roue de médecine; le défi est de découvrir où nous sommes en déséquilibre.

 

Lorsque je parle aux enfants de la roue de médecine, je fais référence à une bande de papillons tueurs dans leur estomac. Nous avons mal à l’estomac, mais nous ne savons pas pourquoi. Nous ne nous souvenons pas d’avoir fait quoi que ce soit qui nous ait rendus malades, alors nous devons parler à un adulte en qui nous avons confiance. Il peut s’agir d’une cause de santé mentale, car la santé mentale peut avoir des symptômes physiques. La spiritualité est l’un des quadrants pour les peuples autochtones, pas la religion, mais bien la spiritualité. Nous avons des cérémonies et peut-être que nous ne sommes pas en contact avec les cérémonies de base de notre peuple. Cela fait partie de notre équilibre. C’est quelque chose qui m’est arrivé. J’étais heureuse en ménage, j’avais une bonne carrière et deux belles filles. Ma vie allait bien, mais je n’étais pas heureuse. J’ai réalisé que je n’étais pas heureuse et j’ai saisi l’occasion de parler à un aîné. Il m’a demandé si je faisais des cérémonies, si je pratiquais mes méthodes traditionnelles, si je faisais de la purification? Je ne le faisais pas à l’époque; j’avais mis cela de côté pour me concentrer sur ma carrière. J’ai retrouvé mes cérémonies, mes traditions et ma culture et j’ai commencé à me sentir plus équilibrée. 

 

Je n’étais pas malheureuse dans mon travail ou dans ma vie, mais ma culture et ma spiritualité me manquaient. Lorsqu’on éprouve ces sentiments, le défi consiste à identifier où se situe le déséquilibre. Certains d’entre nous peuvent le faire par eux-mêmes, d’autres auront besoin d’aide pour trouver où le déséquilibre se situe dans la roue de médecine. Ce qui fonctionne pour certains ne fonctionnera pas pour tous. Nous avons chacun un point d’équilibre heureux et nous oscillons fortement dans une direction, puis trop dans une autre en essayant de le corriger. Nous devons faire attention à ne pas en faire trop pour ne pas créer un nouveau problème. Nous maintenons un équilibre entre le bien-être spirituel, émotionnel, physique et mental. 

 

La roue de médecine propose des cérémonies. Je ne parle ici que de ce qui a fonctionné pour moi, et pas pour d’autres personnes ou cultures. En tant qu’Anichinabée Quay, c’est-à-dire une femme autochtone en ojibwé, l’une des choses les plus importantes que je pratique est les cérémonies de purification, surtout maintenant que je suis une aînée au Centre d’amitié. Lorsqu’on purifie notre esprit, notre corps et notre âme, on les débarrasse des énergies négatives accumulées. On purifie nos yeux pour pouvoir voir les choses clairement, non pas comme nous voulons les voir, mais comme elles sont vraiment. Nous purifions nos oreilles pour que, lorsque nous écoutons, nous entendions ce qui se dit réellement et non ce que nous voulons entendre, et on évite les commérages. Nous purifions nos bouches, afin que lorsque nous parlons, nous disions la vérité sans colporter des ragots sur les autres. Puis nous purifions nos corps, et enfin nos cœurs. 

 

Certaines personnes demanderont également à ce que la plante de leurs pieds soit purifiée. Nous le faisons pour deux raisons. La première est que chacun est très traditionnel, suit un chemin traditionnel, et on s’assure ainsi de rester sur ce chemin en purifiant la plante de nos pieds pour nous débarrasser de l’énergie négative qui pourrait nous faire dévier du chemin. La seconde est pour ceux qui suivent ce que nous appelons le chemin rouge. La voie rouge consiste à vivre sans drogue ni alcool. Si on est sur le chemin rouge, on purifie nos pieds, ce qui nous aide à y rester. 

 

La cérémonie de purification est importante pour nous rapprocher de la Terre Mère et nous débarrasser des énergies négatives. En tant que femmes, lorsque nous faisons une cérémonie de purification, nous portons toujours une jupe cérémoniale à longs rubans. Nous la portons pour honorer nos mères, nos grands-mères, nos tantes et nos sœurs. Lorsque nous marchons sur la Terre Mère et que le bas de notre jupe touche le feuillage de l’herbe et celui de la Terre Mère, elle est honorée, car elle sait que des femmes marchent sur elle. Ces cérémonies nous ancrent à la Terre Mère, nous débarrassent des énergies négatives et nous aident à avancer, à rester concentrés et à garder notre roue en équilibre. 

 

Sam :

Aînée Deb, lorsque vous procédez à une cérémonie traditionnelle de purification, qu’utilisez-vous? 

 

Aînée Deb :

C’est une excellente question. Nous nous purifions avec quatre remèdes sacrés, soit le cèdre, le foin d’odeur, la sauge et le tabac. Le tabac est le plus ancien médicament de la Terre Mère. Le tabac est utilisé comme offrande. Si nous demandons des conseils ou des orientations à nos aînés, nous leur offrons du tabac. Lorsque nous prenons quelque chose de la Terre Mère, y compris des plantes ou d’autres médicaments, nous lui offrons du tabac en signe de gratitude. Lorsque nos chasseurs prennent la vie d’un animal pour notre subsistance, nous offrons du tabac à l’esprit de l’animal pour le remercier d’avoir donné sa vie pour que nous puissions manger. Nous le faisons également avec l’esprit des poissons que nos pêcheurs capturent. Nous offrons également du tabac dans nos bols à purification pour que le Créateur entende nos prières. Le tabac est donc le plus ancien médicament.

 

Le deuxième médicament que nous utilisons est le cèdre. Le cèdre est un médicament curatif. Lorsque j’offre du cèdre dans ma purification lors d’un cercle difficile ou rude, je fais appel aux esprits de nos ancêtres pour qu’ils viennent avec nous et nous donnent force et conseils dans ce que nous affrontons ou ce vers quoi nous nous dirigeons. Le prochain médicament est la sauge. La sauge est un remède purificateur qui élimine les énergies négatives. Dans l’enseignement sur la sauge, on parle de médicament féminin. Le Créateur a donné aux femmes le don d’engendrer la vie et, ce faisant, notre corps se nettoie naturellement chaque mois. Nous appelons cela le temps de la lune, d’autres y font référence comme étant le cycle menstruel. Nous enseignons à nos jeunes femmes qu’il ne s’agit pas d’une malédiction, mais d’un don du Créateur et d’une énorme responsabilité pour donner la vie. Nous sommes perçues comme très puissantes grâce à ce nettoyage mensuel naturel. 

 

Historiquement et encore aujourd’hui, lorsque nous organisons des cérémonies pour nos chasseurs qui partent à la chasse ou pour nos guerriers qui patrouillent dans leurs communautés, les femmes en temps de lune ne participent pas à ces cérémonies, parce qu’elles enlèveraient aux hommes une partie de leurs forces. Même si notre corps se nettoie naturellement chaque mois, nous prenons la sauge pour nous aider à nettoyer notre esprit et notre âme. Les hommes utilisent également la sauge pour nettoyer leur corps de l’énergie négative. La sauge n’est pas seulement utilisée pour nettoyer le corps, elle sert aussi à nettoyer une maison. Nous utilisons la sauge pour évacuer l’énergie négative de nos maisons. 

 

Le dernier médicament est le foin d’odeur. On associe le foin d’odeur aux cheveux de la Terre Mère. Il confère force et vérité. Dans les forces armées canadiennes, le règlement vestimentaire a été adapté pour permettre aux hommes et aux femmes autochtones de porter leurs cheveux en tresse. Une tresse est composée de trois sections qui représentent l’esprit, le corps et l’âme. En commençant par l’esprit, quel que soit notre âge, nous apprenons toujours à garder notre esprit actif. Même si cet apprentissage consiste, par exemple, à ce que notre petite-fille de 15 ans nous montre comment réparer notre téléphone portable lorsqu’on a appuyé sur trop de boutons. Nous apprenons quelque chose de nouveau chaque jour. Si nous sommes seuls et que nous ne gardons pas notre esprit actif et frais, il se décomposera et s’effondrera. Le deuxième brin est le corps. Si nous sommes souvent seuls et que nous mettons de la drogue et de l’alcool dans notre corps, notre corps va se décomposer et s’effondrer. Le troisième est notre âme. Notre âme ne nous dit pas que nous sommes Anichinabés, Allemands ou Japonais. Notre âme nous dit qui nous sommes en tant qu’individus. Nous avons chacun notre propre âme qui nous rend uniques et beaux. Quel que soit le type de corps que le Créateur nous a donné, nous avons tous une beauté et un caractère unique, et c’est très spécial, alors nous devons être fidèles à notre âme. Si nous ne le faisons pas, elle se brisera et s’effondrera. 

 

Si nous prenons notre esprit, notre corps et notre âme et que nous les entourons d’amis, de famille et de communauté, nous les gardons sains et forts. La tresse commence à la nuque et la personne qui tresse, que ce soit vous ou quelqu’un d’autre, prie ce faisant pour que vous ayez de la force, de bonnes pensées et de la positivité. La tresse tombe au centre de la colonne vertébrale sur le dos. Lorsqu’elle est en place, la tresse nous aide à marcher sur un bon chemin droit; elle soutient notre colonne vertébrale et aide à marcher droit. Plus les cheveux poussent longtemps, plus nous sommes connectés à la Terre Mère. Lorsqu’un homme est célibataire, ses tantes, ses sœurs, sa mère ou sa grand-mère lui tressent les cheveux. Quand un homme est marié, seule sa femme lui tresse les cheveux. La seule fois où quelqu’un d’autre lui tressera les cheveux sera une personne dont le couple sait qu’il n’interférera pas dans leur mariage. C’est l’enseignement de la tresse. Partager cet enseignement me tient à cœur lorsque je tiens la tresse de foin d’odeur dans ma main.

 

Lorsque nous prenons les quatre médicaments et que nous les mettons ensemble, nous utilisons un coquillage d’ormeau. Un coquillage de palourde fonctionne également bien, ici, en Nouvelle-Écosse. À Clam Harbour Beach, il y a beaucoup de bonnes coquilles de palourdes qui sont assez épaisses pour faire brûler ces médicaments. Les coquillages symbolisent l’eau. Lorsque les médicaments sont mis dans la coquille, cela représente l’élément terre. Les allumettes que nous utilisons pour allumer les médicaments sont l’élément feu. Si vous êtes coincé, vous pouvez utiliser un briquet BIC, mais traditionnellement nous utilisons des allumettes. Nous utilisons n’importe quelle sorte de plume pour disperser la fumée. Une flamme apparaît à l’allumage et nous utilisons la plume pour la disperser, car nos bouches ne sont pas encore purifiées. Une fois la flamme éteinte, la fumée apparaît et nous procédons à la cérémonie de purification.

 

Sarah :

Merci de partager cela avec nous. Je suis tellement frappée par le pouvoir de ces récits et leur transmission sur le bien-être. D’après mes propres expériences en matière de santé mentale, les histoires puissantes que je me raconte sur le monde qui m’entoure peuvent avoir un impact majeur, laissant souvent entrer beaucoup de négativité. Il me semble qu’il y a beaucoup de choses que vous partagez de votre culture, qui sont utiles pour prévenir et laisser aller la négativité. 

 

Aînée Deb :

Elle a un impact considérable sur ceux qui suivent la culture, la spiritualité et les modes de vie. Au Centre d’amitié où je travaille, beaucoup de personnes viennent au Centre parce que c’est un foyer pour elles et qu’elles ont des problèmes de santé mentale. Il arrive souvent que quelqu’un soit très perturbé et que la cérémonie de purification soit instantanément apaisante. Elle a un effet et un impact majeurs. Lorsqu’on comprend le raisonnement associé à la cérémonie de purification, on est affecté par ce raisonnement et les médicaments. Ce n’est pas pour tout le monde, mais pour la plupart des gens, son seul parfum est apaisant. 



Sarah : 

Une cérémonie de purification peut-elle être pratiquée par une personne seule, ou doit-elle se dérouler généralement avec d’autres personnes dans une communauté?

 

Aînée Deb :

On peut la faire soi-même; les gens la font tout le temps. On la fait aussi souvent que nécessaire. Par exemple, je suis généralement au bureau très tôt le lundi matin. Que voulez-vous, les vieilles habitudes ont la vie dure. Alors, la première chose que je fais est de purifier le bâtiment. Puis, il m’arrive tout au long de la journée de parler à 10 ou 15 personnes et, en tant qu’aînée, je fais une purification entre chaque personne à qui je parle. Cela n’aide pas seulement ma santé mentale et ma roue de médecine, mais aussi les personnes avec lesquelles je parle, car je ne transmets pas d’énergie négative entre les personnes. Cela protège aussi mon bien-être mental; ce serait une journée très lourde et très longue de parler aux gens tous les jours sans purification. 

 

Il est important de comprendre que lorsque nous aidons les autres, nous devons aussi nous aider nous-mêmes. Beaucoup de gens ne le font pas. Les mères ont cette mauvaise habitude; elles veulent aider leurs familles et tout faire pour tous, mais elles doivent d’abord s’aider elles-mêmes. Quand on est malade et épuisé, on n’est utile à personne. Je fais beaucoup de travail prénatal et postnatal ici à Halifax. Surtout d’un point de vue culturel, il est si important que lorsque le bébé dort, nous dormions aussi. Peu importe qu’il y ait de la vaisselle dans l’évier, nous devons prendre soin de nous. Les gens doivent comprendre qu’il n’est pas égoïste de prendre soin de soi. La purification nous aide à nous ancrer. 

 

Sarah : 

C’est un message tellement important, dont on a souvent du mal à se souvenir. Vous avez partagé avec nous des informations et des connaissances très intéressantes, et je voulais faire le lien avec la gestion de la santé mentale et de nos différents besoins individuels. La thérapie par la parole est devenue très populaire. Nous voulons toutefois souligner que ce n’est pas le meilleur moyen pour tout le monde ni peut-être le plus bénéfique pour certains qui cherchent à gérer et à améliorer leur santé mentale. Vous nous avez parlé des cérémonies de purification et des enseignements de la roue médicinale. Y a-t-il d’autres recommandations ou suggestions que vous aimeriez faire et qui pourraient être bénéfiques pour notre santé mentale, sans qu’elles impliquent de parler à un conseiller?  

 

Aînée Deb :

Je suis d’accord pour dire que le moule ne convient pas à tout le monde. Au sein de la culture anichinabée, nous avons des cercles de discussion et des cercles de guérison. Ils sont dirigés par des aînés. Tous procèdent à la purification. Nous commençons par une prière d’ouverture, nous nous asseyons en cercle et l’aîné purifie l’extérieur du cercle pour le refermer. Nous utilisons un bâton de parole. Chacun a la possibilité de tenir le bâton et c’est son temps de parole; personne ne doit l’interrompre. Il y a souvent un feu au centre du cercle; si nous sommes à l’intérieur d’un édifice, j’allume une bougie. Lorsque la personne parle, ce n’est pas à l’aîné ou à toute autre personne du cercle qu’elle s’adresse, mais à la flamme du feu. Le bâton de parole nous donne la force de trouver les mots, et parfois, le fait de nous exprimer, c’est un peu comme vomir. Quand tu te sens malade, tu vomis et tu te sens beaucoup mieux. Je sais que c’est un peu dégoûtant, mais c’est comme ça. Quand on trouve les mots, on se sent mieux. Souvent, c’est dans les mots prononcés qu’on trouve les réponses à nos propres situations. Lorsque le bâton vient à nous, nous n’avons pas besoin de parler à voix haute. Nous pouvons aussi tenir le bâton et utiliser son énergie pour parler en nous-mêmes. Il est important dans le cercle de se rappeler qu’il y a des gens qui nous soutiennent juste en étant là. L’Aîné et le Créateur sont ici, nous avons le pot de purification, et ce qui est dit dans le cercle reste dans le cercle. Il est très important de comprendre cela. 

 

Les cercles peuvent être très utiles. Nous devons vraiment respecter et comprendre la force du cercle et des personnes qui y travaillent ensemble. Il existe également d’autres cérémonies très puissantes. Nos huttes de sudation sont un endroit où l’on peut évacuer l’énergie négative et prendre part à des prières avec un aîné, et à des chants avec tambours. Les gens se connectent aussi à l’eau. Ils se connectent à la Terre Mère connectée à l’eau pour nous ramener à la base. Parfois, il arrive que certaines personnes aient besoin de la médecine occidentale, et ce n’est pas une mauvaise chose. Ce qui fonctionne pour l’un n’est pas toujours ce qui fonctionnera pour un autre. Nous devons trouver notre propre façon de faire les choses. Pour ma part, j’aime toutes ces pratiques et j’utilise un peu de chacune d’entre elles. Nous avons tous besoin de trouver quelque chose que nous aimons, qui nous calme et nous détend et qui soulage notre stress. 

 

Aujourd’hui, je suis dans ma salle de couture. Je couds. C’est pénible pour moi lorsque je souffre d’insomnie ou que je passe une journée particulièrement difficile. Je viens dans ma salle de couture et j’y trouve du réconfort, mon moment zen. Le plus important est de comprendre que nous devons tous trouver la cérémonie qui nous convient. Beaucoup de mes amis qui sont des vétérans autochtones retournent à la terre. Ils vont à la pêche, et dans les bois où tout est vivant. Les arbres sont vivants, nous pouvons écouter le vent et l’entendre nous parler. Imaginez que nous sommes dans une forêt. On est silencieux et on écoute. On entend le souffle du vent dans les arbres et l’herbe, et l’eau. Ça nous ramène à un endroit où l’on se sent bien. 

 

Il est également important de parler aux aînés. Les aînés ne nous disent pas ce qu’il faut faire ou comment le faire, ils écoutent. Ils ne nous disent pas comment résoudre nos problèmes, ils nous laissent parler et, la plupart du temps, nous trouvons nos propres réponses. J’ai reçu un enseignement il y a de nombreuses années, en 2004, d’un aîné de la côte ouest. Dans l’armée, il y a des façons de faire et après 36 ans, il arrive de développer des TOC sur la façon de faire les choses. J’étais très pointilleuse sur la façon dont les choses devaient être faites au travail et à la maison. Il fallait que je plie mes serviettes et que je fasse mon lit d’une certaine manière. J’étais maniaque, pour être honnête. 

 

Parfois, les meilleures discussions se déroulent simplement en s’asseyant et en se présentant aux gens, et c’est ce qui s’est passé cette fois-là à Burnaby, en Colombie-Britannique. Je parlais avec cette aînée, une conversation légère et plaisante pour commencer, puis j’ai commencé à lui parler de tout ça. Elle m’a montré une plume d’aigle. Cela aurait pu être n’importe quelle plume, mais nous avons utilisé une plume d’aigle à ce moment-là. Lorsqu’on regarde une plume d’aigle, on voit que d’un côté elle est assez droite et qu’il n’y a pas de coupures dans le veinage. Lorsqu’on la retourne sur l’autre face, on y voit de petites coupures et de grands espacements. Si vous mettez cette plume sur l’aile d’un aigle, l’aigle volera quand même. Dans notre culture, l’aigle est connu pour voler haut et porter nos prières au Créateur. C’est tout ce qu’elle m’a dit. 

 

J’ai réalisé plus tard qu’elle essayait de me dire que ce n’est pas parce que les choses ne sont pas faites à ma manière, autrement dit qu’elles ne sont pas parfaites, que ça ne fonctionnera pas. Cet enseignement a été très précieux pour moi. Ça m’a facilité la vie. Cela a facilité mon travail dans l’armée et mon travail actuel, ainsi que ma vie à la maison, et avec mes filles et mes petits-enfants. Ce n’est pas parce que ce n’est pas parfait, ce n’est pas parce que mon mari ne plie pas les serviettes comme je le veux, qu’elles ne sont pas propres et rangées dans le placard. Je partage cet enseignement parce qu’il dit non seulement aux anciens combattants autochtones, mais à tout le monde, que même si votre vie n’est pas l’image parfaite que vous imaginez, c’est une bonne vie. 

 

C’est la façon dont nous regardons et traitons les choses qui se présentent à nous, les bosses sur la route, qui peuvent nous rendre plus forts. Les bosses peuvent être dévastatrices pour certaines personnes, alors il faut s’assurer que notre roue de médecine est équilibrée et qu’on sait où trouver de l’aide. Savoir à qui on peut parler et faire confiance, comment on peut faire les choses et ce qui fonctionnera pour nous. Si une méthode ne fonctionne pas pour vous, trouvez-en une autre. 

 

Sam :

Aînée Deb, j’ai remarqué que dans les histoires que vous avez partagées, il n’y a pas d’attachement à la honte ou à la culpabilité. Il s’agit de trouver ce qui fonctionne pour chacun d’entre nous, et de comprendre que nous sommes tous uniques et qu’il n’existe pas de solution unique. Je trouve ça très paisible, cette responsabilité envers nous-mêmes de découvrir ce dont nous avons besoin. 

 

Aînée Deb :

Je ne peux pas dire qu’une seule chose va marcher parce qu’on est tous différents. L’esprit qui sommeille en chacun de nous rend les gens uniques. Notre esprit est unique et, par conséquent, la façon dont nous gérons les choses sera également unique. En matière de leadership, c’est la même chose. On ne peut pas diriger tout le monde de la même manière. Ce qui fonctionne pour certains ne fonctionnera pas pour d’autres. Lorsque nous essayons de trouver la paix de l’esprit et le calme, il y a une connexion spéciale que nous essayons d’établir et nous devons la trouver par nos propres moyens. Aucune personne n’est meilleure qu’une autre. C’est pourquoi dans les cercles personne ne s’assoit sur une grande chaise pour regarder de haut et surveiller; l’aîné est assis dans le même cercle que tout le monde. Il est important de se rappeler que nous sommes tous égaux, quel que soit notre rang, l’uniforme que nous portons, notre travail ou notre situation dans la vie. Un poste ne fait pas de vous un être humain supérieur. La couleur ou l’épaisseur de notre peau ne nous rend pas non plus supérieurs. Nous sommes tous pareils. 

 

Comprendre notre propre caractère unique est très spécial. C’est très important. La société dépeint une image selon laquelle toutes les femmes doivent être minuscules et avoir une apparence et un comportement précis. Il est difficile, en tant que parent élevant des filles et des fils adolescents, de mener ce combat, car nous luttons contre quelque chose de tellement plus grand que tout le reste. La patience, la compréhension, le respect et les enseignements sont ce qui nous aide à nous ancrer. Je parle à mes filles et petites-filles, et à mon petit-fils. Mon petit-fils comprend qu’il doit avoir du respect pour les femmes. Il connaît le temps de la lune et sait qu’il doit avoir du respect en raison des dons et des responsabilités que le Créateur nous a confiés. Il sait que les femmes doivent être traitées avec respect pour cette raison. Il n’a pas à accepter qu’une femme lui manque de respect d’une femme, mais à comprendre cette responsabilité.

 

C’est de cela qu’il s’agit et, comme je l’ai dit plus tôt, j’aimerais bien claquer des doigts et souhaiter que tout le monde comprenne que c’est bien d’être gentil, patient et humain avec les autres. Je sais que je ne peux pas le faire, mais c’est une chimère et je pense que nous sommes sur la bonne voie de la réconciliation. Ma directrice générale au Centre d’amitié est Pamela Glode-Desrochers. C’est merveilleux de travailler pour et avec elle. Elle dit que c’est une question de réconciliaction. Les actions viennent remplacer la finale « ation ». La réconciliaction comporte une porte à double sens. Ce n’est pas seulement la responsabilité des colonisateurs d’apprendre notre culture et les coutumes de notre peuple. Nous devons participer au partage de cette culture. Comment quelqu’un pourra-t-il apprendre si nous ne parlons pas aux gens? Nous devons travailler ensemble. Nous marchons sur cette route côte à côte, pas un devant et un derrière. C’est la réconciliaction. 

 

Sarah :

Nous vous sommes très reconnaissantes d’avoir marché à nos côtés aujourd’hui et d’avoir partagé vos connaissances. Je remarque à travers les cercles, en particulier, une forte intentionnalité vers le respect et le non-jugement. Je pense que c’est vraiment remarquable. Je suis très heureux que vous ayez pris le temps de nous parler aujourd’hui. Vous avez déjà partagé tant de choses avec nous, mais avant de vous laisser partir, nous terminons toujours en demandant à nos invités : si vous deviez donner une leçon de sagesse pour notre bien-être, quelle serait-elle? 

 

Aînée Deb :

Je pense que ce serait d’examiner de plus près nos roues de médecine. Lorsque nous examinons notre propre roue de médecine et la façon de nous maintenir notre équilibre, on vit un moment d’éveil, car on voit où l’on est déconnecté. Si vous êtes une personne autochtone vivant en milieu urbain, il existe des centres d’amitié qui ont des liens avec les aînés et la culture. Il existe 126 centres d’amitié au pays. À Kingston, il y a le Katarokwi Native Friendship Centre. Ceci est particulièrement important pour les personnes qui ne sont pas dans leur propre territoire. Si vous n’êtes pas dans votre propre territoire, apprenez à connaître celui dans lequel vous vous trouvez, honorez-le et reconnaissez-le. Jetez un coup d’œil à notre roue de médecine, et assurez-vous d’être relativement équilibrés. Faites de votre mieux pour trouver des choses qui vous aident à vous sentir en équilibre. 

 

Sam :

C’est tellement beau, merci beaucoup Aînée Deb. 

 

Aînée Deb :

J’apprécie votre écoute, et j’aime partager ce que je sais de la culture. Je ne suis pas une experte, mais je sais ce qui fonctionne pour moi et si le fait de le partager aide d’autres personnes, cela en vaut la peine. Je me sens merveilleusement bien quand je suis capable d’aider les autres. Donc, merci beaucoup.