Salut et bienvenue dans La Chronique ! Moi c’est Manon, et chaque semaine je vous emmène en France pour découvrir sa culture, les habitudes des Français et l’art de vivre à la française !
Ce week-end commence un événement annuel assez apprécié des Français : le Salon de l’Agriculture. Du 24 février au 3 mars, la campagne s’invite en ville puisque la Porte de Versailles, dans le 15e arrondissement de Paris, abrite le plus grand salon agricole européen depuis 60 ans. Dans un pays où la moitié du territoire est exploitée pour des activités agricoles, on peut dire que l’agriculture occupe une place très importante. Le Salon accueille environ 700 000 visiteurs chaque année. Alors pourquoi autant de Français y participent tous les ans ? En quoi consiste le Salon de l’Agriculture ? Quelles sont ses origines ? Je vous réponds dans cet épisode.
Je le répète encore pour les nouveaux auditeurs : la transcription de cet épisode (et de tous les autres d’ailleurs) est disponible gratuitement sur le site frenchcoffeebreak.com. Je parle lentement, j’explique le vocabulaire un peu spécifique ou difficile, mais si je parle encore trop vite pour vous, si vous ne comprenez pas tout, la transcription peut vous aider. Si vous aimez ce podcast, je vous serais aussi reconnaissante de lui laisser 5 étoiles et de le partager avec vos amis qui apprennent le français. Cette émission a besoin de vous pour se faire connaître !
Mais revenons à nos moutons… Le salon de l’Agriculture n’a pas toujours été l’événement populaire et convivial qu’on connaît aujourd’hui. À l’origine, il s’agissait d’un marché de bétail créé en 1844 pour approvisionner la capitale en viande de boucherie. Le bétail, c’est le nom qu’on utilise pour désigner les animaux élevés pour la production agricole. Donc les éleveurs de porcs, de bœufs, de volailles, de moutons venaient dans la capitale pour se faire connaître et vendre leurs produits.
En 1870, le marché devient un concours qui permet de valoriser les différentes filières agricoles françaises. D’abord la viande, puis en 1925, on a ajouté le fromage, le vin, les céréales… Toutes les filières sont représentées.
Finalement, c’est en 1964 que le Ministre de l’Agriculture de l’époque (Edgard Pisani) crée le Salon International de l’Agriculture. 300.000 visiteurs s’y sont rendus dès la première édition, ce qui était déjà énorme pour l’époque, puis la fréquentation n’a jamais cessé d’augmenter pour atteindre 500.000 visiteurs en 1975 et 700.000 en 2014. Donc c’est un événement qui plaît beaucoup aux Français, il attire les adultes mais aussi les familles avec des enfants.
Le salon se déroule au Parc des Expositions de la Porte de Versailles, donc il faut imaginer une immense salle, comme une salle de spectacle, qu’on a divisée en plusieurs sections et où on peut voir des animaux de la ferme, rencontrer les agriculteurs, participer à des activités… L’objectif de cet événement, ce n’est pas simplement de permettre aux gens de voir des animaux, mais de reconnecter le public français avec l’agriculture, d’apporter l’agriculture à Paris pour que tout le monde puisse voir et comprendre d’où vient la nourriture présente dans nos assiettes et comment travaillent les producteurs. Donc l’idée, c’est de faire découvrir et de valoriser les produits français, et aussi de faire de la publicité pour les éleveurs et les producteurs. Le salon est une excellente vitrine pour leurs produits.
Mais vous devez vous demander : pourquoi aller au Salon de l’Agriculture ? Concrètement, qu’est-ce qu’on peut y faire ? Alors, plusieurs choses :
- D’abord, pour les citadins (c’est-à-dire les personnes qui habitent en ville), c’est l’occasion de voir des animaux de la ferme qu’ils n’ont bien sûr pas l’habitude de voir au quotidien. Environ 4000 animaux de toutes les espèces et toutes les races sont présents chaque année : vaches, porcs, chèvres, poneys, moutons, et aussi des animaux un peu plus exotiques, comme des dromadaires ou des lamas ! Pour les enfants, c’est l’occasion de monter sur un poney, par exemple, et si vous avez un jardin, vous pouvez aussi y acheter une poule ! Depuis 2000, la vache est la star du salon. Chaque année, une race de vache parmi les 25 présentes en France est mise à l’honneur et une vache est même choisie pour être l’égérie de chaque édition du salon. Une égérie, c’est une personne (ou ici un animal) qui représente une marque ou un événement. Cette année, la vache égérie s’appelle Oreillette et elle vient de Normandie.
- Il y a aussi des ateliers pour les petits et les grands, une ferme pédagogique (qui explique comment nourrir les animaux, comment les soigner…), il y a des expositions, des quiz… Beaucoup d’activités sont proposées pour rapprocher un peu le public citadin du monde rural et leur faire découvrir des choses sur l’agriculture, mais aussi la nature et la conservation de l’environnement. Les visiteurs peuvent participer à des débats, des conversations, des échanges… C’est très varié.
- Mais… soyons honnêtes : la majorité des visiteurs vont au Salon de l’Agriculture pour les stands de dégustation ! Les gourmands pourront goûter du fromage, de la charcuterie, du vin, de la bière… Toutes les spécialités régionales sont là. On passe de la choucroute à la galette au sarrasin en quelques minutes. C’est une excellente occasion de découvrir les produits français sans quitter Paris !
C’est un événement très médiatisé. Chaque année, le Président de la République se rend au Salon de l’Agriculture le jour de son ouverture pour saluer les agriculteurs et… déguster quelques spécialités françaises, bien sûr ! On en parle donc à la télévision, toutes les chaînes sont sur place pour filmer la venue du Président et des autres personnalités politiques présentes également.
Mais cette année, le Salon sera sûrement encore plus médiatisé que d’habitude car il a lieu dans le contexte un peu particulier de la crise des agriculteurs. Vous avez peut-être vu ou entendu que de nombreux agriculteurs bloquent des routes, des autoroutes, des péages, des parkings, des supermarchés… Ils manifestent devant les lieux de pouvoir comme les préfectures et les ministères. Et vous vous demandez peut-être pourquoi ils protestent. Laissez-moi vous expliquer rapidement…
La France est le leader européen de la production agricole, devant l'Allemagne et l'Italie, avec plus de 70 milliards d'euros de chiffre d'affaires. Elle dispose du plus grand troupeau de bétail d’Europe – ce qu’on appelle un cheptel – c’est aussi le troisième producteur de porcs et le quatrième exportateur mondial de produits laitiers. Donc l’agriculture a une place très importante en France et c’est un secteur très lucratif (qui rapporte de l’argent). Pourtant, le nombre d’agriculteurs diminue chaque année car les exploitations ferment suite à un départ à la retraite ou à une situation financière ingérable, et personne ne souhaite reprendre les fermes qui restent à l’abandon. Il faut dire que les jeunes ne sont pas attirés par la filière agricole. Les conditions de travail sont difficiles : les agriculteurs n’ont pas de vacances, de week-end, d’horaires fixes… Ils travaillent sans compter leurs heures et dépendent souvent de la météo pour vivre. Ils ont une profession essentielle pour le pays et pourtant c’est un des secteurs d’activité les plus pauvres. Ils n’arrivent pas à vivre de leur travail, leur salaire ne leur permet pas de vivre décemment, convenablement, à tel point que certains préfèrent arrêter leur activité, donc abandonner la ferme, ou parfois même mettre fin à leurs jours… J’ai entendu un chiffre qui m’a choquée il y a quelques semaines : tous les 2 jours, un agriculteur se suicide en France, un tous les deux jours ! C’est énorme… Récemment, c’est une décision européenne qui a mis le feu aux poudres. Vous connaissez cette expression ? “Mettre le feu aux poudres” ? Ça veut dire que ça déclenche, ça provoque, des réactions violentes. Les agriculteurs sont déjà fatigués et en colère et, là, c’est la décision de trop qu’ils ne supportent pas, qui met le feu aux poudres. La Commission Européenne a fait passer de nouvelles règles le mois dernier et les agriculteurs accusent aujourd’hui l’Union Européenne d’être responsable de leurs difficultés économiques. On leur impose en effet de nouvelles normes environnementales strictes qui leur coûtent plus cher, alors qu’en parallèle on autorise l’importation de produits du monde entier qui ne respectent pas ces mêmes normes. Par exemple, l’Union Européenne souhaite diminuer l’utilisation des pesticides, favoriser l’agriculture biologique, ce qui diminue la capacité de production des agriculteurs, et donc le chiffre d’affaires. Mais en même temps elle signe des accords économiques qui faciliteraient les échanges avec des marchés d’Amérique du Sud qui n’ont pas les mêmes règles en termes de pesticides. Les agriculteurs français protestent donc depuis des semaines pour mettre en lumière ces paradoxes et montrer à la société qu’ils ne peuvent pas continuer comme ça. Ils ont des coûts de production plus élevés que le prix de vente de leurs produits et ne peuvent pas vivre correctement de leur travail. Ils ne se sentent pas écoutés, pas respectés, pas soutenus par le gouvernement.
Un agriculteur : “On ne peut plus vivre de notre métier ! J’en ai marre ! Une semaine et demie qu’on me dit “David tais-toi, David calme toi !” mais on ne peut plus se taire maintenant !”
Ils essayent aussi d’ouvrir les yeux des consommateurs en leur disant “si vous n’achetez pas de produits français, vous encouragez l’importation de produits qui ne respectent ni l’environnement ni les travailleurs, et vous pénalisez les producteurs français”. C’est pour ça qu’ils bloquent certaines routes et certains camions qui, par exemple, transportent des produits importés d’autres pays.
C’est un problème évidemment plus complexe que ça, je vous l’ai résumé très rapidement, mais c’est globalement ce qui se passe en ce moment. Personnellement, je soutiens les agriculteurs français dans leur démarche et je comprends leur colère. En revanche, je suis un peu partagée vis-à-vis du Salon de l’Agriculture : je crois que c’est important de mettre en valeur les produits français et l’agriculture française… Et en même temps, ça me fait mal au cœur, ça me fait de la peine, de savoir que ces 4000 animaux sont transportés dans des camions et exposés à des centaines de milliers de personnes pendant deux semaines. Ils ne sont pas faits pour supporter tout ce bruit et cette agitation… Je ne mange presque pas de viande et je préfère qu’on laisse les animaux tranquilles, en liberté. C’est donc un événement auquel je ne participe pas, mais si vous êtes à Paris, que vous voulez en savoir plus sur l’agriculture et soutenir les produteurs français tout en dégustant de délicieuses spécialités françaises ( et il y a des options végétariennes), vous avez trouvé le programme de votre weekend ! Le Salon de l’Agriculture se tient au Parc des Expositions de la Porte de Versailles, dans le 15e arrondissement de Paris, du 24 février au 3 mars. Le billet adulte coûte 16€ et vous pouvez réserver en ligne sur le site officiel du salon.
La Chronique, c’est fini pour aujourd’hui. Si vous aimez ce podcast, pensez à lui laisser 5 étoiles et à en parler avec vos amis qui apprennent le français ! On se retrouve la semaine prochaine dans un nouvel épisode de La Chronique. En attendant, retrouvez French Coffee Break sur les réseaux sociaux et sur YouTube pour du contenu en français au quotidien !
